Maux de Lectrices : L’endométriose

26 septembre 2018 10 Commentaires

Aujourd’hui, j’ai choisi de laisser la parole à l’une d’entre vous, Magali. Elle m’a demandé dans le courant de l’été s’il était possible d’évoquer sa maladie, qu’est l’endométriose, sur le blog. Ayant une communauté essentiellement féminine, j’ai accepté, parce que si ce témoignage peut aider ou donner de l’espoir ne serait-ce qu’à une seule d’entre vous, alors je serai la plus heureuse des blogueuses. D’ailleurs, si vous avez envie de vous exprimer sur le blog à propos de sujets qui vous touchent, n’hésitez pas à m’envoyer un petit mail.

Bonjour Magali, on a eu l’occasion d’échanger régulièrement ces derniers mois via messages privés sur Instagram, je te connais donc un petit peu, mais peux-tu te présenter à mes lectrices ?
Bonjour Julie ! Agée de 33 ans, je suis une de tes fidèles lectrices depuis de nombreuses années. Je suis une jeune femme comme bon nombre de tes lectrices je suppose, et c’est donc tout naturellement vers toi que je me suis tournée pour parler de quelque chose qui me tient particulièrement à cœur.

Tu m’as demandé de parler de la maladie dont tu souffres, l’endométriose, et j’ai immédiatement accepté tant les femmes touchées sont nombreuses et cette maladie encore trop méconnue et incomprise. Personnellement je ne la connaissais que de nom, je l’ai découverte en détails en regardant le reportage de Laetitia Milot suite à son accouchement. J’ai été choquée et attristée de son impact sur le corps entier, je me suis rendue compte qu’on en parlait oui, mais mal. Non l’endométriose ne survient pas que le temps des règles, non elle ne touche pas que l’utérus, c’est bien au delà.

Quand et comment as-tu été diagnostiquée ? Quels étaient tes symptômes ?
J’ai été diagnostiquée il y a bientôt 2 ans, suite à une IRM. Depuis 10 ans, je prenais une pilule qui stoppait mon cycle hormonal. Cela avait été mis en place suite à de fortes douleurs « inexpliquées ». Je ne pouvais donc plus parler de règles douloureuses. Par contre j’avais constamment mal quelque part dans mon corps. Difficile à expliquer comme sensation au final. Mais depuis plus d’un an, en plus de tout cela j’avais de très fortes douleurs à la vessie, et celle-ci dysfonctionnait. J’ai consulté bon nombre de spécialistes, passé des examens aussi bien physiquement que psychologiquement violents et intrusifs, tout cela pour m’entendre dire que je n’avais rien et que c’était « dans ma tête ». Mais cette fois j’ai refusé de lâcher, je me suis battue pour que l’on trouve ce qui n’allait pas. Et heureusement, j’ai eu une médecin traitant qui m’a écoutée, crue, et a compris qu’il fallait creuser. Elle a donc demandé cette fameuse IRM. Le diagnostique est tombé, sans aucun doute possible.

J’ai entendu dire que le corps médical n’était pas toujours réactif et mettait bien souvent cela sur le compte de douleurs « normales » liées aux règles, alors que ce n’est pas le cas. Cela repousse le diagnostic et laisse malheureusement le temps à la maladie de s’installer.

As-tu trouvé le corps médical à ton écoute ?
Jusqu’à ce que je rencontre cette doctoresse qui a compris que je ne cherchais pas volontairement et constamment à être malade, mais que ma souffrance physique était réelle, je n’ai jamais été écoutée. Au-delà d’une maladie méconnue ou incomprise, la force des certitudes du corps médical était telle que selon 2 ou 3 symptômes, un diagnostic était posé et un traitement mis en place. Celui-ci ne me soulageait que partiellement, voire pas du tout, mais qu’à cela ne tienne. Si cela ne me soulageait pas, ça n’était pas parce que le corps médical ne trouvait pas d’où venait le problème. Cela venait de moi, c’était dans ma tête et je devais prendre du recul, consulter pour comprendre d’où venait ce constant besoin d’avoir mal et surtout je devais aller de l’avant. Jusqu’au jour où le diagnostic à été posé. Là, tout a changé. Des mots ont été mis sur mes maux, j’avais enfin le droit d’avoir mal. Le changement du regard du corps médical, de son discours en a presque été amusant. Mais malgré cette reconnaissance de la maladie,, il a encore fallu que je me débrouille seule, que je fasse mes propres recherches pour trouver les spécialistes qui sauraient m’accompagner, m’expliquer cette maladie que je connaissais peu et que je devais apprivoiser. Oui, j’ai été soulagée que l’on reconnaisse enfin que ma souffrance est réelle et que je ne la cherche pas. Mais la violence du passé et les injustices ne s’effacent pas et quand je me retrouve face à des médecins qui ne connaissent pas ou peu la maladie, je me dis que la route est encore longue.

Au quotidien, comment la maladie se manifeste t-elle ? Est-elle handicapante ?J’ai une endométriose peu intrusive selon mes IRM, mais néanmoins extrêmement symptomatique. Il ne se passe pas une journée sans que j’ai mal, que ça soit dans le bas ventre ou autre. Car il faut savoir que cette maladie ne touche pas que les ovaires, bien au contraire. Le tissu endomètre peut aller se nicher où bon lui semble. Et donc rendre le corps inflammatoire dans son ensemble. De plus, il s’agit d’une maladie hormonale. Donc avec les douleurs « de base », liées au cycle, viennent s’ajouter au quotidien des douleurs musculaires, des migraines, des troubles gastriques, une fatigue accrue, une irritabilité, une hypersensibilité. Mais bien sûr le plus difficile à gérer reste la douleur, qui prend par surprise et peut mettre KO en l’espace de quelques minutes.

As tu un traitement pour soulager tes maux ?
Après avoir trouvé un formidable gynécologue spécialisé dans l’endométriose, nous avons testé quelques anti-douleurs. Mais la volonté de tomber enceinte complique quelque peu la prise de traitement, car l’idéal pour soulager la femme est de mettre le corps au repos, à savoir arrêter le cycle. C’était donc hors de question en ce qui me concerne ! J’ai donc du doliprane, du Spasfon, et essayer d’être à l’écoute de mon corps pour bien savoir quand je dois faire attention, ne pas forcer. J’ai également eu la chance de pouvoir être accompagnée par une magnétiseuse qui travaille sur l’endométriose et ses maux. Je reste donc douloureuse, mais j’ai quelques trucs et astuces pour faciliter le quotidien. Car aujourd’hui, à ma connaissance, il est impossible de totalement soulager l’endométriose et ses conséquences.

Cette maladie a t-elle eu un impact sur ta féminité ? Ta vie personnelle ? Tes proches ? Ta vie professionnelle ?
La maladie n’a pas impacté ma féminité au sens strict. Mais souffrir au quotidien impacte forcément la vie privée. Et l’endométriose a clairement chamboulé toute ma vie sur ces deux dernières années. Car l’arrêt de tout contraceptif ou autre traitement lui a laissé le champs libre pour se développer. Je savais que c’était le prix à payer pour espérer devenir maman de façon naturelle. Mon conjoint est le soutien le plus formidable que je pouvais espérer. Il est le plus grand témoin de cette maladie et de son impact. Il est aussi malheureusement celui qui se sent parfois le plus impuissant face à tout cela, mais il m’aide au quotidien et cela me rend plus forte. Il est ce fameux « roc » qui me permet de continuer à avancer. J’ai également un cercle familial et d’amis qui a très vite compris la violence de cette maladie. Ils sont un soutien sans faille, depuis des années. Alors que je sais que parfois cela peut-être déstabilisant de me voir souffrir, à priori sans raison, et surtout alors que 5 minutes avant tout allait bien. Ils ont su être présents au moment du diagnostic, des doutes que cela amène, de mes craintes et de mes coups de mou. Ils ont été une force quand je ne m’en sentais plus capable. L’endométriose a très fortement impacté ma vie professionnelle. Bien avant que le diagnostic ne tombe d’ailleurs. Car j’avais souvent des petites maladies, des micro-absentéismes, des coups de très forte fatigue. Il m’a un jour clairement été dit que cela passait pour un manque de motivation, de la non-envie de travailler. Quelle claque pour quelqu’un comme moi qui aime son travail et qui fait toujours de son mieux ! Alors quand le diagnostic a été posé, j’ai pris le temps de digérer puis j’en ai parlé à mon manager qui venait d’arriver et donc ne me connaissait que très peu. Car je ne voulais pas qu’il pense que je n’aimait pas mon métier, je savais le combat qui m’attendait. Il a réagi avec beaucoup de justesse et m’accompagne au quotidien depuis. Il a facilité cette partie de ma vie et a su me rassurer quand j’en avais besoin. Il y a également eu des échanges avec mes collègues, pour que ceux-ci puissent mieux comprendre la situation et savoir réagir en cas de crise de douleur. Il a fallu du temps pour que je leur en parle, pour que je ne me sente plus mise à nu dès que le sujet était abordé. J’ai le bonheur de travailler avec une super équipe et sans surprise leur réaction a été un vrai soutien. Si parfois c’est encore compliqué au travail, je sais que cela ne me pénalise plus et aujourd’hui je m’épanouis totalement professionnellement. Si l’endométriose fait partie de moi, j’ai appris à l’accepter mais surtout j’ai appris à ne pas en rougir, à ne pas en avoir honte. J’en parle donc de plus en plus facilement. Elle fait partie de moi mais ne définit pas qui je suis et c’est ce qui compte pour moi.

Et aujourd’hui, comment vas-tu ? Il me semble que la magie de la vie a fini par opérer avant une opération programmée en septembre.
En juin, lors d’un rendez-vous de suivi ou je montrais des signes de fatigue extrême, le gynécologue m’a annoncé qu’il souhaitait m’opérer. Nous devions tout mettre en place en aout pour que cela soit fait à la rentrée. Mais effectivement peu de temps après nous avons appris la plus formidable des nouvelles : je suis enceinte. Cela me semble encore parfois irréel, nous sommes sur un merveilleux nuage. Après, tout n’est pas magique non plus, puisque la maladie ne me laisse pas tranquille, malgré ce que bon nombre de personnes pensent. Oui, il est toujours possible de souffrir en étant enceinte. Dans les premiers mois en tous cas. À suivre avec l’évolution de la grossesse. Bien que je lise l’étonnement encore chez certains médecins, persuadés que la grossesse met la maladie en sommeil, le corps médical qui me suit a été honnête : cela arrive que la femme enceinte souffre toujours. Il faut « simplement » attendre que la grossesse élimine naturellement les adhérences et autres lésions. Donc pas de solution miracle, mais du Doliprane, du Spasfon et du repos pour essayer de limiter les douleurs. Il faut essayer de me protéger pour que la grossesse se passe au mieux.

Quels sont tes conseils pour les jeunes filles aux règles anormalement douloureuses ? Heureusement les langues se délient, la maladie est plus vite envisagée de nos jours. Il ne faut donc pas hésiter à consulter, à exprimer ses douleurs, son ressenti. Avoir mal n’est pas normal, n’est pas une fatalité. Cependant, qui dit règles douloureuses ne signifie pas forcément endométriose. Il ne faut donc pas tomber dans le piège de se dire « je suis atteinte d’endométriose » si les règles sont douloureuses. Il peut exister de très nombreuses causes. Il faut donc consulter. Et si on ne se sent pas entendue par son médecin, ne pas hésiter à en changer.

Enfin, un mot pour les femmes atteintes, comme toi, d’endométriose ?
Cette maladie est un fléau qui certes ne tue pas, mais pourrit la vie de tous les jours. Il faut en parler, autant que possible, pour qu’elle soit connue et reconnue. Chaque femme est unique, chaque endométriose également. Il faut donc, selon moi, faire tout notre possible pour qu’elle cesse d’être si peu maitrisée par le corps médical. Qu’on arrête de simplement constater qu’on ne connait pas bien cette maladie et qu’on commence à réaliser que si deux femmes sur dix sont touchées, ça ne doit pas rester un mystère médical. Je crois que j’ai surtout envie de m’adresser à celles qui ne parlent pas, ne partagent pas cette maladie et leurs douleurs. Le partage ne rend pas la maladie moins douloureuse, c’est vrai. Mais il lui enlève une partie de son poids sur le quotidien. À tort ou à raison, je crois que le soutien de l’entourage au quotidien est indispensable. Et il le restera tant que le corps médical sera aussi peu réactif à ce sujet. Bien sûr, parler de cette maladie n’est pas toujours facile, elle touche à ce qu’il y a de plus intime. Chaque femme doit donc faire en fonction de ce qu’elle est prête à partager. Pour ma part, je continuerai à en parler le plus librement possible, parce que je ne peux pas me taire et me dire que cette maladie doit être mieux maitrisée. En espérant qu’un jour cela ne soit plus qu’un très mauvais souvenir.

Mille mercis à Magali pour ce témoignage, beaucoup de courage & de belles choses pour la suite. Si vous avez besoin d’aide ou d’informations, n’hésitez pas à vous rendre sur EndoFrance qui est le site de l’association de française de lutte contre l’endométriose.

10 Commentaires

  • Clémentine 26 septembre 2018 at 11 h 24 min

    Bonjour, merci d’avoir pris cette initiative. Courage à toutes

  • Steph_Pttdd 26 septembre 2018 at 13 h 40 min

    Merci de nous partager ce beau témoignage Julie, je souhaite tout plein de bonheur à Magali !

  • Marie-Jo 26 septembre 2018 at 21 h 41 min

    Merci de nous avoir fait partager ce témoignage si émouvant, je souhaite plein de bonheur à Magali et à son mari

    • Julie World Of Beauty 28 septembre 2018 at 14 h 04 min

      Oh oui plein de bonheur à eux, ils le méritent avec un tel combat à mener au quotidien.

  • L0vely_claire 26 septembre 2018 at 22 h 39 min

    Super témoignage, c’est vraiment chouette d’avoir partagé tout ça.

    • Julie World Of Beauty 28 septembre 2018 at 14 h 03 min

      Je suis de ton avis, c’est un beau témoignage plein d’espoir malgré la maladie.

  • Sur un petit nuage 30 septembre 2018 at 13 h 37 min

    Merci à toi Julie pour cet article invité en quelques sortes et à Magalie pour avoir oser en parler. De plus en plus de femmes en parlent et même si malheureusement ça ne fait pas changer les choses, cela peut peut-être changer le regard des hommes sur certaines femmes qui souffrent sans forcément l’afficher.
    Certaines femmes sont vraiment très très fortes ♥

    Votre article à toutes les 2 m’a tellement touché, alors que je ne souffre pas de ce mal, que je vais le partager sur ma page !
    Il faut en parler de cette maladie si douloureuse !
    Et qui sait peut-être qu’un jour un autre traitement que la stérilité apparaîtra !

    Je vous embrasse toutes les 2

    • Julie World Of Beauty 30 septembre 2018 at 22 h 22 min

      Tu as raison, je trouve que l’endométriose fait partie de ces maladies qui ne se « voient » pas, alors si ce beau témoignage peut aider à mieux comprendre ce que vivent les femmes qui en sont atteintes, ce sera un immense pas en avant.

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